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Image de Tatiana Zhukova

Ce que la douleur veut dire


Il y a quelques années à Mysore dans le Sud de l' Inde, en stage intensif d'Ashtanga , je me suis blessée aux ischio-jambiers. A la fin du cours je suis allée voir mon professeur Ajay Kumar pour lui faire part de ma douleur et il m'a répondu en souriant :"Pain is a gift" (la douleur est un cadeau!)

En bonne occidentale que j'étais (et que je suis toujours), j'étais outrée: comment avait-il pu me dire cela? Il m'a fallu du temps pour accepter, digérer et comprendre ce qu'il avait voulu exprimer. La pensée dont il s'est inspiré dérive d'un textes fondateur de l'hindouisme, la Bhagavad Gita. Dans ce contexte la douleur agit comme un révélateur en dirigeant la conscience là où, jusque là, ça semblait endormi. Que ce soit physique ou moral. Que ce soit de type inflammatoire, chronique, plus ou moins profond ou superficiel...

Super, mais alors, qu'est-ce qu'on en fait? La réaction à la douleur est extrêmement subjective et par là même complexe à évaluer. La médecine traditionnelle s'en mord d'ailleurs les doigts et se trouve souvent démunie face aux nouveaux maux (maladies auto-immunes type fibromyalgie, intolérances alimentaires, réactions allergiques...). Les patients se retrouvent trop souvent seuls face à leur (s) douleur (s) non diagnostiquées et donc apparemment inexistantes. Non diagnostiquées car invisibles, innommables, non répertoriées. Et on sait combien l'écoute, la reconnaissance et le sentiment d'empathie participent au processus de guérison. Tout comme on sait que l'indifférence, le manque d'écoute et le sentiment d'isolement peuvent aggraver le ressenti de la douleur.

Alors, qu'est-ce qu'on fait? On peut (si on a du temps de l'énergie de l'argent et beaucoup de patience) passer d'un spécialiste à un autre, d'un examen à un autre, d'une méthode à une autre. C'est toujours intéressant mais au bout d'un moment le corps (et la tête) risquent d'être noyés d'informations et il parait plus délicat de distinguer les "bons" effets des effets moins désirables. Mieux vaut sans doute se tourner vers quelqu'un de confiance pour nous orienter dans le processus de la guérison.

Bien sûr (même si la médecine traditionnelle évince fréquemment cette dimension), l'émotionnel joue une part énorme. On est bien, détendu, l'intensité de la douleur parait moins élevée, on la supporte mieux. En revanche, si d'une manière globale on ne sent stressé, contrarié et traversé par des pensées et émotions de nature plus négative, le degré d'intensité parait généralement plus haut, moins tolérable. Alors, première chose: se détendre. L'exercice de la méditation à ce niveau est extrêmement intéressant, ainsi que les différentes méthodes de relaxation issues du Yoga (Yogathérapie) et autres approches qui participent à restaurer le lien corps-esprit.

La respiration occupe un rôle central: avez-vous déjà remarqué que le simple fait de respirer procure de la détente et possède une action antalgique? Alors plutôt que de bloquer la respiration, comme on aurait tendance à la faire pour "se protéger", au contraire ramener de la conscience dans la ou les zone (s) douloureuse (s), poser une main si cette /ces partie (s) est accessible, respirer, envoyer de la bienveillance , de la chaleur, de l'amour.

Car la douleur possède une fonction. L'inflammation par exemple est un mécanisme de défense qui normalement disparaît d’elle-même une fois que l’irritation est apaisée et que l’organisme est adéquatement protégé. Or parfois la douleur perdure tandis qu'elle n'est à priori plus nécessaire. Le retour à l'homéostasie, dont voici une définition: "Tout système laissé à lui-même en l’absence de perturbation extérieure revient spontanément au bout d’un certain temps à son état d’équilibre" est empêché. Alors, une dernière fois, que faire?

On peut se sentir impuissant, victime, en colère, en détresse... Ou on peut se dire que derrière tout ça se cache quelque chose que l'on ne veut pas voir. Quelque chose que notre corps tient à nous dire, depuis longtemps sans doute, mais on se bouche les yeux et les oreilles et on continue comme si de rien, et on exige de ce corps qu'il reste efficace, obéissant et discret. Mais lui il n'est plus d'accord!

Alors peut-être s'agit-il d'une invitation (un peu forcée c'est vrai) à se plonger dans son histoire, ses ressentis, la symbolique qui nous est propre? Une invitation à mieux se connaitre dans ses forces et dans ses failles, dans ses zones d'ombre et dans sa lumière car les deux coexistent... Une invitation à "s'arrêter pour voir". Bien sûr, il peut être réconfortant et précieux d'être guidé dans ce processus. Mais au fond du fond, votre meilleur guérisseur, c'est vous-même! Alors...

Ayez confiance.

Namaste

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